Blog Ginkoe
Depuis le début du confinement, les entreprises font face à des problèmes inédits. Pour toutes, et après 8 semaines de confinement, le retour des salariés qui ont été en situation d’arrêt de travail devient un enjeu crucial.
La période de confinement liée au Corona virus accentue à la fois le nombre et la durée des arrêts de travail. Ceux-ci sont très variables en fonction des symptômes du Covid-19, allant d’arrêts relativement courts d’environ 3 semaines à des arrêts plus longs (avec) entrainant une période de rééducation dans les cas graves.
Au-delà de ces arrêts maladie en lien avec le Covid-19, de nombreuses personnes sont éloignées de leur travail (chômage partiel, vacances imposées et autre..). Pour elles, la question du retour au travail se pose aussi, notamment pour celles qui rencontrent des difficultés à vivre la crise. Elles seront –ou non – en arrêt de travail et reprendront leur activité alors qu’elles se sentent encore en « convalescence du confinement ».
Des études fondées principalement sur l’expérience chinoise de confinement en population générale* évaluent à 35% les personnes qui se déclarent affectées plus ou moins sérieusement par des troubles psychologiques modérés et à 5% celles qui présentent un stress sévère. Ces chiffres chinois s’entendent sur la population générale et non sur la population active. Il faut donc rester très prudent dans leur interprétation. On peut cependant s’attendre, en plus des arrêts maladie provoqués par le Covid-19, à des arrêts dus au confinement lui-même. L’incertitude étant telle sur ce nouveau virus, seul l’avenir nous donnera le nombre exact et la durée des arrêts maladie dans les prochains mois.
L’expérience des arrêts de travail de longue durée (plus de 3 mois) montrent qu’ils ont des conséquences sensibles sur la trajectoire professionnelle du salarié.
Plus les arrêts maladies sont longs, plus le retour est difficile. Les arrêts de plus d’1 mois augmentent les risques d’être au chômage ou inactif l’année suivante. Au-delà de 6 mois, moins de 50 % des personnes concernées reprennent une activité professionnelle (DRESS – octobre 2015).
Afin de prévenir ce type de décrochage, il est donc important que le salarié ne passe pas trop de temps éloigné de son entreprise…
Dans ce contexte, et avec l’appui des dispositifs d’accompagnement de l’entreprise, comment préparer au mieux le retour du collaborateur et sa réintégration dans l’équipe ?
Voici quelques éléments pour vous y aider :
Lors de l’arrêt maladie, le contrat de travail est suspendu. Il reprend (suite à) avec la décision de la médecine du travail qui évalue l’état de santé du salarié et donne un avis d’aptitude.
Cependant le manager peut se rapprocher de son salarié dans la mesure où il le fait avec discernement, et bienveillance, en tenant compte des particularités de chacun. Certains cabinets juridiques déconseillent l’écrit ou les appels pendant les horaires spécifiés dans l’arrêt. Ceci est d’autant plus vrai que le volume de mails reçus a considérablement augmenté, ainsi que la charge mentale. Dans tous les cas, il faut éviter tout agissement répétitif si le salarié ne souhaite pas de contact avec son entreprise. Il existe des réactions très différentes en fonction des salariés qui sont en droit de refuser de répondre.
Le confinement va probablement faire évoluer les pratiques. Avec le développement du télétravail et des échanges en vidéo, beaucoup de salariés sont entrés via l’écran de leur ordinateur dans l’environnement personnel de leurs collègues ou collaborateurs, et réciproquement. Que l’on trouve cette évolution positive ou non, les frontières ont bougé…Ceci facilitera t-il les contacts ?… à confirmer sur le plus long terme !
Quoiqu’il en soit, l’important est d’établir, avec son autorisation, un contact avec le salarié. (avec son autorisation.) Ce passage d’information du manager au salarié va permettre à (celui-ci) ce dernier de suivre ce qui se passe dans l’entreprise, le rassurer sur son appartenance à celle-ci et à son équipe. Il va pouvoir se projeter plus facilement sur son retour (même si cela n’est pas encore possible et d’actualité). Les collègues de travail peuvent également jouer un rôle positif de relais d’information et lui faire percevoir qu’il bénéficiera de leur soutien à son retour.
Manager la reprise d’un salarié n’est pas chose évidente. Souvent, bien que la personne soit médicalement apte au travail, elle est changée par l’épreuve personnelle qu’elle a traversée.
Elle a des doutes quant à ses capacités à gérer à nouveau son activité professionnelle et à reprendre sa place dans l’équipe. Ceci peut encore être accentué par le fait que lors du confinement certains salariés dans les fonctions opérationnelles et managériales auront été très sollicités alors que d’autres seront restés éloignés et n’auront pas partagé l’activité et l’expérience de leurs collègues présents.
Eviter le désengagement, faire en sorte que les salariés qui ont été absents se sentent encore partie prenante de l’entreprise, les embarquer sans distinction sera important pour tous et impactera l’organisation sur le moyen et long terme.
Dans le cas d’arrêts prolongés, le responsable doit savoir qu’il va retrouver un collaborateur qui n’est pas tout à fait le même physiquement, émotionnellement et mentalement… Parfois les épreuves renforcent, parfois elles fragilisent…
Mettre le salarié en confiance et le laisser s’exprimer sur sa situation sera déterminant dans ce cas. Son manager sera amené à être particulièrement attentif: écouter, faire preuve de curiosité, d’intérêt, poser des questions sans être intrusif, communiquer de manière bienveillante et ouverte (en écartant jugement, complaisance, projection etc….). Si le collaborateur bénéficie d’un aménagement thérapeutique ou présente encore des signes de fatigue, de perte de concentration, il devra aussi faire preuve de créativité pour trouver des solutions avec l’ensemble de l’équipe. Sur le terrain, le manager peut se trouver désarmé, ayant pour seule référence de la maladie son expérience personnelle ou celle de ses proches.
Il ne doit pas hésiter à s’appuyer sur les dispositifs de l’entreprise et la médecine du travail. Si l’entreprise n’a pas les ressources en interne, elle peut faire appel à des intervenants extérieurs spécialisés pour les salariés et les managers (formation, accompagnements, coaching de rétablissement). Une prise en compte le plus tôt possible permet une réinsertion en douceur, préserve la qualité de la relation manager-collaborateur et est finalement importante pour tous. La remobilisation du collaborateur et la qualité de la reprise seront positives pour l’équipe et sont autant de remparts contre de futures absences et contre un désengagement porteur de nouveaux problèmes médicaux et psychosociaux….
Dans la période si particulière dans laquelle nous entrons, il nous faut saisir l’opportunité d’apporter des solutions créatrices pour tous les collaborateurs de l’entreprise, salariés et managers. Afin de trouver un climat plus apaisé où chacun a sa place, face aux défis de la reprise.
*Qiu, et Al “A national wide survey of psychological distress among chinese people in Covid 19 epidemic : implications and policy recommandations” General Psychiatry 2020;33:e 100213